Peu à peu, le monde médiéval se met en place et une certaine unité se fait jour, illustrée par les malheureuses entreprises des Croisades.
Les Croisés ramènent en France de somptueux produits: oliban, myrrhe, eau de rose, lourds et précieux tissus, tapis luxueux, épices… Et peu à peu, le raffinement revient en Europe. On est encore loin de l’art de vivre français du XVIIIème siècle, mais quelques règles d’hygiènes reviennent, telles que se laver les mains lors des repas.
Et en 1190, le parfum devient une industrie française: la corporation des gantiers-parfumeurs est créée. Il ne s’agit pas encore des gants parfumés qui seront si en vogue par la suite; pour l’instant, il est simplement question de tremper les gants, faits de cuir tanné dont l’odeur est pestilentielle, dans des bains de senteur jusqu’à ce que l’odeur disparaisse et soit remplacée par celle des plantes.
Peu à peu, le métier de parfumeur se développe et se différencie de celui de gantier. Les apothicaires se mettent à la parfumerie dans l’optique de l’hygiène: on croit à cette époque que se frictionner avec des plantes odorantes éloigne les maladie, notamment la peste. Un ravissant objet, la pomme d’ambre, contenant des substances précieuses comme l’ambre justement, ou le musc et la civette (la civette étant une autre sorte de musc), devient un accessoire de mode et d’hygiène. On le porte sur soi comme un bijou auquel on attribue des vertus de propreté et d’aphrodisiaque.
Une pomme d’ambre ou pomander (source: http://lartdesmets.e-monsite.com/pages/les-soins-du-corps-au-moyen-age/le-parfum-au-moyen-age.html)
Sous le règne de Louis XV est créé la première Eau de Cologne. Conçue comme une eau de soin, elle ne sera en usage dans toute l’Europe qu’au XIXème (rappelez-vous Scarlett O’hara cachant son haleine alcoolisée en se vaporisant d’Eau de Cologne, dans le film « Autant en emporte le vent, juste avant que le beau Rhett Butler ne la demande en mariage …).
Il faut attendre le XVIIIème siècle pour que la conception actuelle du parfum fasse son chemin dans les esprits. A la fin de ce siècle, on se met à prendre des bains régulièrement, ce que font déjà les Anglais. Ces fameux Anglais qui semblent toujours être en bonne santé… Et voilà, le parfum comme source d’hygiène, c’est terminé! Place au parfum-séduction! On a enfin compris que pour être propre, il fallait se laver avec un vrai savon et de l’eau, et que le parfum ne sert qu’à sentir bon.
L’une des plus anciennes Eaux de Cologne encore vendue de nos jours (source: http://www.pure-beaute.fr/2011/01/17/leau-de-cologne-le-succes/)
Arrive alors l’industrialisation de la France. Après elle, très rapidement, les premières maisons de couture éclosent (Charles Frederick Worth vers 1870 par exemple). Et ces maisons de mode, pour laisser une trace olfactive de leur passage dans le monde, se mettent à créer des parfums. La maison Guerlain ouvre en 1828 et 35 ans plus tard, après bien des produits très à la mode, son premier grand parfum, « Eau de Cologne impériale », est créé. De nombreuses autres marques très anciennes, telles que Bourjois, lui emboîtent le pas.
Un flacon d’Eau de Cologne Impériale (source: http://www.perfumeprojects.com/museum/bottles/EDC_Imperiale.shtml)
Le parfum moderne est donc une idée, un ressenti, la recréation de la nature ou d’un imaginaire. Les premiers parfums touchaient le coeur par leur fonction religieuse; maintenant, ils doivent toucher les sens. Séduire, adoucir ou impressionner, mais surtout ne jamais laisser indifférent. D’où l’engouement qu’ils suscitent aujourd’hui, et espéront-le, pour longtemps encore…
D’après Elisabeth de Feydeau, conférence « L’épopée du parfum »
Spécialiste du parfum, Elisabeth de Feydeau a écrit plusieurs livre dont le dernier est sorti le 3 novembre:
Les parfums: histoire, anthologie, dictionnaire
Collection Bouquins
Editions Robert Laffont.
Les parfums: histoire, anthologie, dictionnaire
Collection Bouquins
Editions Robert Laffont.